Feuilleton d’automne

Publié le par Louis Racine

Feuilleton d’automne

Chères lectrices, chers lecteurs, j’ai mis à profit le temps que me laissait la rediffusion du Sourire pour décider si oui ou non je publiais Sauf, et, ma décision prise, en préparer l’exécution.

Un matin de février dernier, j’ai trouvé dans ma boîte aux lettres une grande enveloppe non affranchie portant seulement la mention « Les feuilletons de Louis Racine ». Elle contenait une autre enveloppe, sur laquelle était inscrit en majuscules ce simple mot : SAUF. À l’intérieur, une liasse de feuillets dactylographiés et sept cahiers d’écolier de petit format, numérotés et couverts d’une écriture que je ne connaissais pas. Aucun nom d’auteur (à part celui quil se donne dans son ouvrage), aucune indication plus précise de ce que j'étais censé faire de tout cela.

Déjà, ai-je supposé, le lire.

Cette tâche accomplie, j’ai enquêté sur ce mystérieux Sylvain Manoury, au Havre notamment, où il prétend avoir vécu ; en vain : aucune trace de lui nulle part.

Sept mois plus tard, il ne s’est toujours pas manifesté. Il peut encore le faire !

Il semblait vouloir que je publie son manuscrit sur ce blog. Je ne suis certes pas éditeur, sinon de mes petits romans, mais la démarche m’a paru pertinente s’agissant d’un tel texte. C’est ainsi qu’autrefois une œuvre d’un genre très différent mais dont l’auteur échappait lui aussi à toute identification, et dont aucun monitor n’eût repêché la carcasse, L’Hiver minimal, fut mise en ligne par un internaute non moins désintéressé que l’énigmatique Ludwig Kasack.

J’en ai bien sûr parlé autour de moi. Si je n’avais recueilli que des avis négatifs, je me serais peut-être abstenu. Tout au contraire, on est allé jusqu’à me reprocher mon hésitation, et ce détail inquiétant, que l’inconnu ait réussi à se procurer mon adresse et se soit presque introduit chez moi, a pu passer pour la preuve d’une motivation à laquelle je n’avais pas le droit de rester insensible.

Il est vrai que, d’une certaine manière, j’avais été choisi : c’est après la publication de Planteur et des premiers épisodes de La Pierre que m’était parvenu ce manuscrit. Mon intérêt pour Le Havre avait dû être déterminant.

Là ne s’arrêtent pas les clins d’œil. Le texte de Sauf recourt fréquemment à mes propres références, et j’en suis troublé. Non que j’ignore ce que peut l’imagination dès lors qu’elle est orientée par l’intention ; mais l’état physique du manuscrit témoigne de son antériorité par rapport aux publications susdites. De sorte que j’incline à penser que l’écrivain fantôme s’est reconnu en moi. J’ai donc renoncé à chercher dans mon entourage l’auteur de ce qui n’eût été en somme qu’un canular. J’avais même cru pouvoir l’imputer à ce cher Bathurst, oubliant sa cécité – et l’élévation générale de son œuvre.

Un problème subsistait toutefois : outre que j’allais devoir saisir l’intégralité du texte, parfois difficile à déchiffrer (certaines pages m’ont demandé des heures d’un travail quasi monacal), il me revenait de le diviser en épisodes de dimensions à peu près égales. Combien ? De quelle taille ? Pour quel rythme de parution ? Aucune consigne ne m’avait été donnée. Il m’a donc fallu trancher – ainsi, par exemple, pour une publication les jours impairs. Et ces choix, joints au travail de la saisie, ont fait qu’aujourd’hui je me sens un peu responsable de Sauf, malgré toute mon aversion pour le personnage qui s’y exprime.

Rendez-vous mercredi 23 septembre – à la naissance de l’automne – pour la première livraison de ce nouveau feuilleton. D’ici là, armez-vous de patience ; elle pourra vous servir par la suite !

 

Publié dans Sauf

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